Est-il possible de supprimer la prémédication par corticoïdes des traitements hebdomadaires par paclitaxel ?

Question évaluée : Le traitement des cancers mammaires par une séquence de paclitaxel hebdomadaire sur 12 semaines est un standard pour les prises en charge (néo)adjuvantes. Du fait du risque d’hypersensibilité (HSR) à l’administration de paclitaxel, une triple prémédication associant un corticoïde, un antihistaminique H1 et H2 est systématiquement proposée. La survenue d’effets indésirables associés à une exposition séquentielle de corticoïde sur plusieurs semaines (prise de poids, hyperglycémies, immunodépression, …) pose la question de la faisabilité de suspendre cette prémédication après les deux premiers cycles, durant lesquels surviennent la quasi-totalité des HSR au paclitaxel. L’objectif principal de cette étude était la non-infériorité du taux d’HSR entre les deux premières semaines S1 et S2 et la suite du protocole. Une évaluation de la qualité de vie et de la variation pondérale était également associée.

Type d’étude : Étude prospective monocentrique menée au Brésil entre août 2016 et janvier 2017.

Méthode : Inclusion continue des patients en traitement (néo)adjuvant par paclitaxel hebdomadaire (80 mg/m²). L’ensemble des prémédications (dexamethasone 20 mg, ranitidine 50 mg, diphenhydramine 50 mg) étaient administrées par voie intraveineuse 30 minutes avant le paclitaxel. A partir de la troisième semaine, la prémédication par dexamethasone était suspendue.

Résultats : En 5 mois les données de 25 patients ont été recueillies (âge moyen 49,5 [25-71]), dont la majorité (56%) dans un contexte néo-adjuvant. Au total 50 cycles avec (S1 et S2) et 250 cycles sans dexamethasone ont donné lieu à deux HSR durant les deux premiers cycles (respectivement de grade 1 et 2) et aucune HSR à partir de la troisième administration. Aucun changement de poids notable n’était relevé, et l’évaluation de la qualité de vie était également non-différente entre les deux premières semaines et la suite du traitement.

Points forts :

  • Étude associant le taux d’HSR avec la mesure de la qualité de vie des patients.

Points faibles :

  • Étude non-contrôlée,
  • Il existe un biais du fait que la totalité des patients avait reçu de la dexamethasone à visée antiémétique durant les cycles à base d’anthracycline,
  • Il existe un biais méthodologique du fait que les patientes pouvaient également recevoir des corticoïdes à visée antiémétique pendant l’étude, même si aucune n’y a eu recours,
  • Sur ce type d’étude, même si la puissance semblait suffisante, il semble dommage de n’inclure qu’un nombre réduit de patients.

Conclusion/Implications en pratique : Les questions autour de la prémédication des HSR au paclitaxel sont nombreuses. S’agissant de l’utilisation des corticoïdes, même si la tolérance semble acceptable au vu du schéma séquentiel, il est éthique de se poser la question de l’exposition des patients à une molécule qui semble inutile au-delà des deux premiers cycles. Cette question a été posé également pour l’utilisation d’un anti-H2 mais pour des raisons pharmacologique cette fois. Malheureusement, les auteurs n’abordent pas le caractère obligatoire de cette triple prémédication (RCP) et l’ensemble des études qui mettront en évidence la faisabilité d’une désescalade ne pourront être mises en pratique qu’à la condition d’une modification des RCP.

Rédigé par Florian SLIMANO

D’après de Castro Baccarin et al.: The feasibility of dexamethasone omission in weekly paclitaxel treatment for breast cancer patients. Support Care Cancer 2018. Publication avancée en ligne le 1er août. DOI: 10.1007/s00520-018-4381-0