Evaluation de l’impact économique potentiel de l’arrondi de dose des chimiothérapies injectables dans un centre hospitalier

Question évaluée : Dans un contexte de maîtrise des dépenses associé à l’explosion des coûts des chimiothérapies, la mise en place de stratégies de minimisation des coûts s’avère nécessaire, comme par exemple l’arrondi de doses. Le but de cette étude est de déterminer si l’arrondi de dose permet de diminuer les coûts et le gaspillage dans un centre ayant une faible activité oncologique.

Type d’étude : monocentrique rétrospective sur les prescriptions informatisées de chimiothérapies injectables sur une année dans le centre de Durham, en Caroline du Nord.

Méthode : Les prescriptions informatisées de chimiothérapies injectables (basées sur la surface corporelle) avec

  • calcul des doses après arrondi à 5 % par défaut pour toutes les prescriptions d’une part,
  • et jusqu’à 10 % pour les cas où des métastases sont documentées d’autre part.

Dans les deux cas, les auteurs ont sélectionné les prescriptions pour lesquelles l’arrondi entrainerait une économie de flacon en calculant le pourcentage de différence avec et sans arrondi sur la base du prix d’achat ainsi que les quantités totales potentielles de chimiothérapies économisées.

L’objectif principal était d’évaluer la minimisation potentielle des coûts et l’objectif secondaire d’évaluer la minimisation potentielle du gaspillage.

Résultats : Les auteurs ont analysé 877 prescriptions (70 patients), dont 52 % documentaient des métastases.

Avec un arrondi des doses à 5 % : n=140 prescriptions auraient permis une économie potentielle de flacon évaluée à 22 849 $ soit un coût 3,8% inférieur au coût sans arrondi. La majorité (74 %) de l’économie concernait 3 molécules : bortezomib, rituximab, carfilzomib. Au total, 83 802 milligrammes de chimiothérapies auraient pu être économisés.

Avec un arrondi des doses à 10 % : n=248 prescriptions permettraient une économie de flacon évaluée à 30 911 $ soit un cout 5,2 % inférieur au coût sans arrondi. Deux tiers de l’économie concernait les mêmes molécules. Au total, 129 011 milligrammes de chimiothérapies auraient pu être économisés.

Points forts

  • Étude incluant beaucoup de molécules,
  • Cette stratégie aurait un impact même dans un centre de petite taille comme dans l’étude.

Points faibles

  • Biais principal : tous les flacons sont considérés comme monodoses et tous les flacons entamés sont considérés comme jetés,
  • Étude basée sur des coûts potentiels et non réels,
  • Non exhaustive : n’inclue pas les prescriptions en fonction du poids des patients,
  • L’arrondi à 10 % pose des questions d’ordre éthique : le pronostic du patient doit-il influer sur le degré d’arrondi de dose? Qu’en est-il de l’efficacité ?

Conclusion/Implications en pratique : Même pour un centre oncologique de petite taille, un arrondi de dose systématique à 5 % par défaut pourrait permettre une économie significative pour l’établissement. Cette étude réalisée dans le système de financement américain doit être évaluée en prenant en compte l’environnement français. Cette stratégie est simple et facile à mettre en place, peut être paramétrée informatiquement. En revanche la quantité de chimiothérapie non gaspillée est difficilement interprétable en matière de coûts ou d’économie puisque la plupart des établissements réutilisent les reliquats de flacons.

Rédigé par Leslie GUILLEMETTE et Olivier REGNIER-GAVIER

D’après Chillari et al.: Assessment of the potential impact of dose rounding parenteral chemotherapy agents on cost savngs and drug waste minimization. J Oncol Pharm Pract. 2017. Publication avancée en ligne le 21 juillet. DOI: 10.1177/1078155217722205